Franchir la « vallée de la mort » avec l’Instrument PME

Depuis 2014, la Commission Européenne propose via son programme Horizon 2020 un nouvel outil de financement au sein de sa palette de « calls » (appels à projets) et de « topics » (sujets) : l’Instrument PME. A la veille d’évolutions importantes concernant ce dernier, et maintenant que ce dispositif a acquis une notoriété certaine en France, arrêtons-nous un instant dessus.

Cet instrument de financement public a pour objectif d’aider les PME innovantes à franchir la « Vallée de la Mort » : cette période où le financement de l’innovation devient difficile. Trop avancée dans le processus d’innovation, l’entreprise n’a plus accès aux fonds publics habituels des projets de Recherche & Développement. Mais elle n’est pour autant pas assez avancée pour bénéficier facilement de financements privés : capital risque, prêts bancaires avantageux, et tout simplement revenus récurrents issus des ventes.

Par contre, le niveau de risque augmente significativement pour l’entreprise entre ces deux phases. Investissement dans un outil de production, optimisation du produit, embauche de collaborateurs, protection intellectuelle, réglementations et certifications… Les investissements augmentent, mais pas encore les ventes. Et comme pour tout produit ou service innovant, l’adoption par le marché demeure incertaine.

L’instrument PME comble ce fossé. Ce concours fonctionnant comme un appel à projet est divisé en 3 phases distinctes et adaptées au développement d’une innovation :

  1. Phase 1 : étude de faisabilité. 50k€ de subvention, 70% de financement. Prouve la faisabilité technique et commerciale du produit ou du service innovant. Le projet dure 6 mois.
  2. Phase 2 : développement et optimisation. 0,5 à 2,5M€ de subvention, 70% de financement. Couvre les coûts finaux de développement et d’accès marché, en rapport avec la stratégie d’accès sur le marché. Le projet coure sur 24 mois maximum.
  3. Phase 3 : mise sur le marché. Pas de financement direct, mais une aide à l’accélération sous forme de coaching, facilitation d’accès au capital risque, à la communication.

Un financement attractif mais compétitif

Reconnaissons-le tout de suite, l’Instrument PME présente de nombreuses qualités qui en font sans doute un des meilleurs instruments de financement à la disposition des entreprises. 70% de financement d’un projet pour finaliser le développement d’un produit ou d’un service, avec ou sans partenaire, 30 pages à remplir en phase 2, 10 pages en phase 1, une procédure de dépôt simple et efficace et surtout, entre 0,5 et 2,5 millions d’euros de subvention, puisque nous pouvons postuler en phase 2 directement. La liste complète des entreprises sélectionnées se trouve ici.

La conséquence directe de ses nombreuses qualités est que les taux de succès pour être financé sont bas, très bas. 1514 propositions avaient été déposées au 1 juin dernier, 57 ont été retenues. 4 %. Et cela ne s’est pas arrangé avec 2123 propositions déposées à la dernière « cut-off » date du 18 octobre.

La probabilité d’obtenir plus d’un million d’euros de subvention est donc faible. Et ce, malgré un investissement conséquent pour monter un « dossier phase 2 ». Même en faisant appel à un consultant spécialisé, cela représente au minimum 150 heures de travail pour l’entreprise. Ces efforts sont nécessaires pour pouvoir compléter un dossier qui, au vu de la compétition, devient très exigeant.

Phase 1, vous avez dit phase 1…

Mais avant de courir vers ce million d’euro, posons-nous une question : quel est notre objectif ? Est-ce d’obtenir 1 million d’euros ? Ou bien est-ce in fine de mettre un nouveau produit sur le marché, grâce à ce million d’euros ? Se poser la deuxième question conduit à devoir connaitre de manière très précise sa stratégie d’accès au marché, et de ce fait son marché.

Les entreprises ont parfois tendance à se focaliser sur le premier objectif et donc à occulter la phase 1. Or celle-ci répond à de réels besoins pour les entreprises : obtenir une étude de marché internationale personnalisée, vérifier les réglementations internationales, obtenir une vidéo professionnelle de son produit pour le promouvoir et augmenter sa traction marché, obtenir des accords clients, développer un plan de commercialisation international…

Passer par une phase 1 multiplie également par trois les chances de succès pour obtenir le financement de phase 2 tant convoité. Avec un dossier de 10 pages à monter, elle ne représente pas un gros investissement. Et elle ne fait que repousser le délai de mise sur le marché de quelques mois par rapport à une durée s’étalant sur plusieurs années. Voir même, elle peut le raccourcir grâce à la connaissance en profondeur acquise quant à la stratégie d’accès au marché.

En conclusion, L’Instrument PME est bien l’un des meilleurs instruments de financement à la disposition des entreprises innovantes. Bien construit, il donne les moyens de comprendre comment franchir notre Vallée de la Mort avec la phase 1, puis de la franchir avec la phase 2. Quant à la phase 3, les premières entreprises sont en train de la découvrir, nous en saurons donc plus dans quelques mois.

Prochain billet : Instrument PME, des projets business, business, business !

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