Comment l’expérience d’évaluation des projets européens a aidé l’initiative Time for the Planet…

Marjory WACHTEL est Directrice du Développement de BENKEI. Elle est également à titre personnel membre du comité scientifique de Time for the Planet.

En 2019, lorsque j’ai connu Time for the Planet (www.time-planet.com), j’ai suivi avec attention les fondateurs et leur communication si originale de jeunes entrepreneurs à succès, puis j’ai franchi le pas et contacté un des fondateurs afin qu’il me donne plus d’informations sur cette initiative, qui a pour ambition de sauver la planète grâce à l’entreprenariat.

Je me suis rendu compte que mon expérience passée d’expert évaluateur de la Commission Européenne (CE) sur différents programmes de support à la R&I pouvait leur être utile et j’ai proposé mon aide.

En effet, la méthode d’évaluation de la CE, bien que méconnue, n’en est pas moins une vraie épreuve de force tant par le nombre de projets évalués (270 000 projets évalués pendant Horizon 2020) et le nombre d’évaluateurs (chaque année 20 000 experts prennent part à l’évaluation), que par l’équité, l’objectivité et la transparence de celle-ci.

  • Objectivité ; parce que les experts sont indépendants et que la CE n’intervient à aucun moment dans leur prise de décision. Même à Bruxelles, lors des réunions en présentiel, il y a un expert indépendant en charge de vérifier les conflits d’intérêts.
  • Equité aussi ; parce que la CE recrute des experts dans toutes les thématiques du programme cadre, chercheurs mais aussi spécialistes de leur domaine, secteur public ou privé. Au-delà de l’équilibre recherché entre des experts de la recherche académique et de l’industrie, l’équité entre hommes et femmes est aussi respectée.
  • Enfin, transparence ; car le mécanisme d’évaluation ainsi que les critères sont définis lors de l’appel à projet et fournis aux évaluateurs ; enfin parce qu’un rapport d’évaluation rédigé par les experts évaluateurs est fourni à tous les porteurs de projet.

Cependant, le principal défaut de ce mécanisme reste la lourdeur des dossiers soumis par les porteurs de projet, le nombre d’évaluateurs limité par projet (3 ou 4) et le temps imparti pour les experts (en moyenne 4h pour un projet de 70 pages et de 5 M €).

Time for the Planet s’est inspiré de ce modèle CE, tout en proposant à l’intelligence collective de remplacer une évaluation hyper formatée et représentative seulement des avis de 3 à 4 personnes maximum. En laissant le champ libre aux innovateurs sur les informations fournies, Time for the Planet évite une lourdeur administrative qui peut être rédhibitoire pour un innovateur, et peut empêcher un bon projet d’arriver jusqu’aux évaluateurs.

En misant sur l’intelligence collective et donc un grand nombre d’évaluateurs pour juger du potentiel des projets, le processus gagne en fluidité tout en gardant :

  • Objectivité : les évaluateurs ne sont pas forcément membres de Time for the Planet. Ils reçoivent tous la même formation et utilisent les mêmes indicateurs d’évaluation disponibles sur le site.
  • Equité : chaque évaluateur donne son avis et chaque avis compte ; pas de privilèges et le comité scientifique (organe d’évaluation scientifique des meilleures innovations) donne des notes de consensus. La diversité des évaluateurs et la parité homme femme sont peut-être à monitorer de façon plus précise.
  • Transparence : les évaluateurs peuvent poser des questions aux innovateurs et tout le monde voit la question et la réponse – les innovateurs ont accès à toutes les informations les concernant mais aussi concernant les autres innovations.

Le processus d’évaluation de Time for the Planet vise bien sûr à s’améliorer au cours du temps, mais pour une première application de cette ampleur – Time for the Planet a reçu puis évalué en 12 semaines 150 projets, ce qui représente 5000 évaluations (chaque projet étant évalué en moyenne par 25 évaluateurs) pour pré-sélectionner 10 innovations présentées ensuite au Comité Scientifique – on ne peut que les féliciter et les encourager à maintenir ce cap : l’intelligence collective au service d’un process juste et transparent.

2 réflexions sur « Comment l’expérience d’évaluation des projets européens a aidé l’initiative Time for the Planet… »

  1. Bonjour

    Actionnaire de time for the planet, j’ai payé pour voir. Je suis impressionné par la démarche, la transparence, le côté participatif, les étapes franchies. J’ai l’impression d’avoir bien investi
    Je m’interroge cependant sur la puissance de frappe de cette démarche. 7 millions d’euros en 2 ans, même s’il y a une accélération, ce n’est rien par rapport au montant manipulé par la commission européenne, les différent fonds d’investissement, BPI, etc
    Vous nous éclairez sur l’intérêt du processus de sélection et cela répond en partie à mes interrogations.
    Mais si ces bonnes idées sont vraiment des bonnes idées, l’argent devrait pleuvoir de partout pour les financer, essaimer, accélérer le développement ?
    Comment le financement TFTP s’articule vs les autres sources possibles? Est ce que le côté open source ferme des portes?

    • Bonjour Marc … et toutes nos excuses pour la réponse tardive !
      Le financement Time for the Planet ne ferme pas de portes et va pouvoir se cumuler avec les aides européennes ou celles de la BPI. La puissance financière de Time for the Planet est en effet moindre par rapport à celle d’autres fonds, mais la vision est différente, l’apport de valeur est un combiné de financement, de puissance de réseau/communication et un apport de compétences avec le recrutement d’un CEO. Le constat de Time for the Planet est justement que mettre beaucoup d’argent ne suffit pas. Enfin, les bonnes innovations pour Time for the Planet ne sont pas nécessairement celles qui le sont aux yeux d’investisseurs classiques. On vise une rentabilité économique, un modèle moins novateur de partage en licence libre ou encore une équipe solide déjà constituée. N’hésitez pas si vous avez d’autres questions !

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