Nous avons choisi chez BENKEI, et avec le soutien financier appréciable de la Métropole de Lyon, de réaliser notre bilan Carbone avec WeCount, en particulier parce que nous souhaitions comprendre, faire, et surtout être capable de piloter notre trajectoire bas carbone. Nous avons donc pris le temps, mis des ressources et, surtout, nous nous sommes retroussé les manches. Cependant nous nous sommes heurtés à deux difficultés et c’est sur cela que j’aimerai revenir.
1-le périmètre
La première difficulté c’est de bien comprendre ce que regroupe chacun des 3 « scopes » sur lesquels nous allons comptabiliser notre émissions GES.
Les scopes 1&2 c’est facile : ce sont les émissions directes et indirectes provenant des installations fixes ou mobiles situées à l’intérieur du périmètre organisationnel. D’une part, les émissions directes provenant des sources détenues ou contrôlées par l’organisation : combustion des sources fixes et mobiles, procédés industriels hors combustion, fuites de fluides frigorigènes … d’autre part, les émissions indirectes associées à la production d’énergie électrique, de chaleur ou de vapeur importée pour les activités de l’entreprise.
Là où cela se corse, c’est lorsqu’on regarde le scope 3 car il concerne tous les autres postes d’émissions de gaz à effet de serre d’une entreprise et là la vraie question c’est « où commence-t-on et où s’arrête- t- on de compter ? ».
Je vous passe les heures de débats philosophique sur le sujet. Nous avons ainsi décidé par consensus que notre périmètre s’arrêtait (fin de vie de notre service) à la soumission des demandes de financement (pour notre activité de demande de financement) et que pour la gestion de ces mêmes demandes (quand elles sont acceptées) notre périmètre de déplacement incluait ceux du coordinateur de projet (notre client).
Nous allons l’afficher bien clairement avec notre bilan, car nous pensons que c’est le référentiel que devraient adopter les sociétés de notre écosystème.
Cependant en réfléchissant à ce périmètre nous nous sommes rendu compte que les projets (notamment européens) avaient une empreinte carbone très importante, liée aux déplacements pour les réunions de partenaires, obligatoires lors du projet. Imaginez une réunion au fin fond de la Finlande, 2 avions minimum pour arriver sur le lieu de réunion, 10 partenaires partout en Europe et chaque partenaire vient à la réunion avec 2-3 collaborateurs… on est vite à 60 tonnes émises juste pour venir à la réunion. Je n’ai pas encore compté les repas, les nuits d’hôtel… Il sera donc important de réfléchir à ce que nous pouvons faire pour limiter ces émissions nécessaires et obligatoires – il faut bien se rencontrer pour faire progresser la science – mais peut-être moins fréquemment, dans des endroits plus accessibles ou moins nombreux ?
2-les incertitudes
Une fois le périmètre défini, nous sommes partis à la recherche des données, car si on n’utilise pas les bonnes données les incertitudes sont amplifiées et finalement le résultat est médiocre…L’incertitude d’un bilan carbone est l’écart potentiel existant entre la valeur des émissions de gaz à effet de serre mesurée et le CO2e réellement émis. En bref, l’incertitude c’est la marge d’erreur sur les résultats de votre bilan carbone.
Nous avons donc préféré reprendre toutes les notes de frais une par une pour connaitre le nombre de km faits, le nombre de nuits d’hôtel, le nombre de repas et toutes les factures de fournisseurs pour savoir de quels types de services il s’agissait , plutôt que de juste rentrer nos données financières. Pourquoi me demanderez-vous ? Pour ceux qui ne sont pas familiers avec le bilan Carbone , voilà comment on calcule : on prend une unité (km parcouru en avion) et on le multiplie par le facteur d’émissions (de l’ADEME) d’un km voyagé en avion moyen-courrier par exemple et cela nous donne le nombre de kg de Gaz à effet de serre émis : en l’occurrence l’incertitude quand on connait le type d’avions et le nombre de km est très faible, 10% environ, donc on peut dire que la donnée est fiable. Et sinon, si tu as la flemme tu prends le montant de ta facture globale (de toute les vols de l’année) et tu multiplies par un facteur d’émission monétaire dont l’incertitude est plus grande 80% …. en effet selon la compagnie et le jour d’achat, un vol de même distance aura un prix très variable. Le montant de carburant brûlé est le même, mais le prix peut être 50x plus élevé. Une donnée d’activité “500€ dépensé chez Air France” ne donne pas de calcul très précis.
Si vous avez un résultat de 3t CO2e sur l’impact de vos transports avec une incertitude de 10%, peut-être qu’en réalité vos émissions sur ce secteur représentent plutôt 2,9tCO2e ou 3,1tCO2e mais si l’incertitude est de 80% vos émissions sont entre 0.6 tCO2e et 5.4 tCO2e , donc vous imaginez bien que pour une société de service dont les déplacements sont la majorité des émissions, il est important d’utiliser la bonne donnée.
Et au final cela donne quoi notre bilan Carbone ? 108 Tonnes en 2022 sur le périmètre expliqué plus haut et en ayant fiabilisé la donnée au maximum … bien sûr il nous reste des progrès à faire et nous pouvons encore améliorer notre donnée mais nous sommes fiers de cette première étape .
Mais le plus important ce n’est pas le bilan carbone mais bien évidemment notre stratégie de décarbonation car c’est elle qui va montrer qu’on s’engage et qu’on ne fait pas du greenwashing …
Ce n’est pas l’indicateur qui importe mais bien ce qu’on en fait …
D’ailleurs, je ne peux pas m’empêcher de vous parler de ce consultant qui indique face à son bilan Carbone « je suis meilleur que XX% de mes concurrents » et là on peut se dire «il n’a rien compris ». Le bilan carbone n’est pas un outil de comparaison et la photo à l’instant T importe moins que la trajectoire de réduction engagée.
Avec le bilan Carbone comme indicateur (bien compris de tous !) et une bonne stratégie de décarbonation on va tous gagner une terre vivable …